Une nouvelle enquête sous couverture publiée aujourd'hui (4 novembre) révèle l'immense souffrance de 70 millions de lapins d’élevage (par an) encore en cage dans des exploitations en Europe et rappelle avec force à la Commission européenne la nécessité urgente de mettre en œuvre l'interdiction des cages qu'elle a promise.

Une enquête sur un système…

Ces images troublantes, filmées sous couverture dans des élevages en Italie et en Pologne, montrent des lapins dans des cages si petites qu'ils ne peuvent même pas s'étirer, certains rongeant désespérément les barreaux de leur cage par frustration, et d'autres même enfermés dans des cages à côté de lapins morts. Les conditions montrées, qui sont représentatives de l'élevage de lapins en cage dans toute l'Europe, ne répondent même pas à leurs besoins comportementaux les plus élémentaires.

Pourtant, en raison du retard pris par la Commission pour interdire l'élevage en cage dans l'UE et de l'absence de législation spécifique aux lapins d'élevage dans l'UE, ces conditions restent parfaitement légales.

Les enquêteurs ont constaté des lapins :

• entassés dans des cages si petites qu'ils ne pouvaient ni s'étirer, ni sauter, ni se dresser sur leurs pattes arrière, des comportements naturels pourtant fondamentaux
• confinés dans des cages individuelles, bien qu’ils soient des animaux sociaux
• morts ou malades, gisant sans vie avec les oreilles arrachées ou incapables de lever la tête à côté de lapins vivants
• N’ayant pas de matériaux à ronger pour limer leurs dents (qui poussent constamment) et par stress et ennui (puisqu’il n’y a aucun environnement à explorer), les lapins rongent de façon compulsive les barreaux de leur cage ou les oreilles de leurs congénères, et tournent sur eux-mêmes. Ces comportements stéréotypiques traduisent un mal-être profond.
• logés sur des sols grillagés inconfortables, ce qui entraîne des blessures et des lésions de la peau, des pattes
• haletant fortement dans deux exploitations, en raison des températures élevées
• présentant une perte importante de pelage dans une des exploitations, indiquant probablement la présence de parasites, d'une infection, ou de troubles du comportement

… Alors qu’un autre élevage est possible

En Europe, environ 77 millions de lapins sont abattus chaque année dont 15,9 millions en France. On estime que 90 % d'entre eux sont enfermés dans des cages, y compris la quasi-totalité des lapines reproductrices.

En 2021, en réponse à l'initiative citoyenne européenne « Nouvelle ère sans cages », signée par plus de 1,4 million de citoyens européens, la Commission s'est clairement engagée à présenter des propositions législatives visant à mettre fin à l'élevage en cage d'ici à la fin de l'année 2023. Pourtant, l’institution européenne n'a pas tenu sa promesse.

Il y a quelques semaines, CIWF France a publié deux rapports qui font l’état des lieux des avancées législatives, des actions d'entreprises majeures de l'agroalimentaire et des systèmes d’élevage hors-cage ayant déjà fait leur preuve à grande échelle en Europe et en France. Le rapport « Les entreprises agroalimentaires passent à l’action pour une Europe sans cage » montre comment les grandes entreprises agroalimentaires européennes passent avec succès à la production hors-cage. Il rappelle que ces entreprises attendent que l'UE respecte son engagement d’interdire les cages dans l’ensemble de l’UE pour créer des conditions équitables et garantir une concurrence loyale sur le marché. Ce rapport liste par ailleurs les États membres qui ont déjà interdit les cages à l’échelle nationale, ou qui se sont engagés à les éliminer progressivement, notamment l'Autriche, la Belgique et les Pays-Bas. C’est donc possible !

La Commission européenne appelée à faire de l’interdiction des cages sa priorité !

Neuf citoyens européens sur dix demandent la fin de l'utilisation des cages. Les conclusions du Dialogue stratégique sur l'avenir de l'agriculture européenne reflètent un large consensus dans le secteur agroalimentaire sur la nécessité de supprimer progressivement les cages et appellent la Commission à publier d'ici 2026 au plus tard une proposition de révision de la législation européenne.

Vinciane Patelou, responsable CIWF UE, a déclaré :

Cette enquête montre clairement la cruauté systémique de l'élevage en cage dans toute l'Europe. Il ne s'agit pas de quelques mauvais élevages qui maltraitent les animaux dans certains pays, mais bien de l'élevage de lapins en cage dans l'ensemble de l'Union européenne, en l'absence dans la législation européenne d'exigences spécifiques au bien-être des lapins d'élevage.

Les cages ne peuvent tout simplement pas répondre aux besoins physiologiques et comportementaux des animaux d'élevage et leur utilisation n'est pas nécessaire ; des alternatives viables sont déjà disponibles et ont été adoptées avec succès par de nombreuses grandes entreprises agroalimentaires européennes.

Yvan Savy, directeur de CIWF France, ajoute :

La Commission européenne doit agir et respecter son engagement de présenter des propositions visant à interdire les systèmes de cages pour les lapins et tous les autres animaux d'élevage dès que possible. Le gouvernement français doit soutenir cette proposition au niveau européen et proposer des mesures d’accompagnement appropriées pour la transition au niveau national. Des systèmes alternatifs d’élevage de lapins ont déjà fait leur preuve en France : il faut accélérer leur déploiement. 

Alors que débutent cette semaine les auditions des candidats commissaires par les eurodéputés afin de les questionner sur leurs compétences et leurs priorités notamment en termes d’agriculture, CIWF envoie le rapport d’enquête aux eurodéputés et à la Commission et demande instamment à ses partisans à appeler la Commission européenne de faire de ces propositions une priorité et à les inclure explicitement dans son programme de travail.

Pour plus d'informations sur la campagne, consultez cette page de notre site.

Pour plus d’informations sur l’enquête, consultez le rapport et les images associées.

Des séquences de l'enquête (sans voix off, avec les sons naturels) sont disponibles sur demande (avec un guide / timecode).

Notes aux rédacteurs

1.Les informations disponibles sur l'étendue de l'élevage de lapins dans l'UE sont limitées, mais selon un rapport de la Commission européenne de 2017, environ 119 millions de lapins ont été élevés et abattus chaque année à des fins commerciales en 2016, auxquels s'ajoutent 61 millions de lapins élevés dans des élevages domestiques ou non commerciaux. Depuis lors, l'UE n'a pas publié de données sur le nombre de lapins, mais les données publiées via les tableaux de bord CIRCABC (plateforme de la Commission européenne) sur le tonnage de viande de lapin produite suggèrent que d'ici 2022, le nombre de lapins a diminué pour atteindre 70 à 80 millions produits par an. Ces données sont cohérentes avec celles publiées par la FAO, qui estime que l'Union européenne a produit 72 millions de lapins en 2022.

2.En 2020, l'EFSA a indiqué que l'un des principaux effets du manque de matériaux appropriés pour l'expression du comportement de rongement chez les lapins est une réorientation du comportement de rongement vers la cage ou même entre les lapins. En ce qui concerne le manque d'espace, l'EFSA suggère que la longueur nécessaire pour un saut est de 70 cm, en fonction de la taille du lapin, et le Conseil de l'Europe recommande que les lapins détenus à des fins expérimentales soient en mesure d'effectuer trois sauts consécutifs.

3.Environ 300 millions d'animaux d'élevage sont détenus dans des cages dans l'UE, dont 40 % du cheptel de poules pondeuses (près de 152 millions de poules), 90 % des lapins d'élevage (environ 70 millions de lapins) et 96 % des truies reproductrices (10 millions de truies). Les animaux élevés en cage sont souvent confinés dans des environnements nus, soit surpeuplés, soit dépourvus de tout contact social, incapables de se retourner ou d'exprimer les comportements propres à chaque espèce.

4.Selon l'Eurobaromètre 2023, 94 % des citoyens de l'UE estiment qu'il est important que les animaux d'élevage disposent de suffisamment d'espace pour pouvoir se déplacer, se coucher et se lever, et 89 % estiment qu'il est important que les animaux d'élevage ne soient pas enfermés dans des cages individuelles.