Des fonds publics qui financent un projet non durable !

Une nouvelle étude menée par CIWF et publiée à l'occasion de la Journée mondiale de la pieuvre (8 octobre) révèle que les gouvernements du monde entier ont dépensé des millions sur les fonds publics pour développer l'élevage de pieuvres, cruel et non durable, et que la grande majorité de ces fonds ont été dépensés par le gouvernement espagnol.

Plus précisément, l'étude estime qu'un total d'au moins 13,3 millions d'euros de fonds publics a été dépensé par les gouvernements du monde entier pour la recherche visant à développer l'élevage de pieuvres, et que le gouvernement espagnol a dépensé au moins 9,7 millions d'euros pour développer cette activité. L'étude montre que l'Espagne a dépensé environ 3,6 millions d'euros en utilisant des fonds de l'UE, soit en finançant, soit en bénéficiant de prêts pour soutenir les entreprises privées impliquées, et que l'Italie a dépensé plus d'un quart de million d'euros pour des projets d'élevage de pieuvres.

En dehors de l'UE, le Chili a dépensé environ 2,4 millions d'euros, la Nouvelle-Zélande plus d'un demi-million d'euros et l'Australie 324 000 euros, tandis que le Mexique a reçu 89 000 euros du Programme des Nations unies pour le développement d'élevages de pieuvres. Toutefois, l'étude a révélé que les informations sur le financement public des projets ne sont souvent pas librement accessibles, ce qui indique que les montants réels pourraient être beaucoup plus élevés et qu'il est nécessaire d'accroître la transparence des dépenses publiques afin que les gouvernements puissent être tenus pour responsables.

Un sondage commandé cette année par CIWF et Eurogroup for Animals a montré que près de 8 personnes sur 10 (79 %) interrogées dans neuf pays de l'UE sont d'accord pour dire que lorsque l'argent public est utilisé pour financer l'élevage d'animaux aquatiques, il ne devrait soutenir que les élevages durables*. En Espagne, 83 % des personnes interrogées sont de cet avis.

Une mobilisation tentaculaire...

CIWF et plus de 90 ONG et scientifiques - dont Bloom, L214, LFDA, Sea Shepherd France, Welfarm - adressent aujourd'hui une lettre conjointe au Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, et les ministères espagnols concernés afin de l'exhorter à cesser de financer l'élevage de pieuvres et à prendre des mesures législatives pour l'interdire.

Alan Cumming, acteur hollywoodien de renom soutient la campagne :

Il est choquant que des gouvernements du monde entier consacrent des fonds publics à la recherche pour développer une activité aussi cruelle et préjudiciable à l'environnement que l'élevage de pieuvres. Il faut y mettre un terme. 

Samedi, neuf militants d’associations de protection de l'environnement et des animaux, dont CIWF, Eurogroup for Animals et Greenpeace, se sont rassemblés devant le Congrès espagnol pour souligner les raisons pour lesquelles le premier élevage de pieuvres au monde, prévu à Gran Canaria par l'entreprise de produits de la mer Nueva Pescanova (NP), doit être stoppé.

Parmi les orateurs figurait le Dr Elena Lara, biologiste marine et directrice de recherche à CIWF, elle a déclaré :

En cette Journée mondiale de la pieuvre, nous demandons instamment au gouvernement espagnol et aux autres gouvernements à travers le monde de faire ce qu'il faut et de cesser de financer l'élevage de pieuvres. De nombreux citoyens seront outrés de savoir que leurs impôts financent l’élevage industriel de ces créatures fascinantes et intelligentes, élevage qui par ailleurs nuit à l'environnement. Nos recherches révèlent également un manque de transparence qui rend difficile une estimation du montant de l'argent public consacré à ces projets. Les gouvernements devraient être responsables et ne financer que des pratiques durables et non pas des systèmes toxiques pour les animaux, les êtres humains et à notre planète.

L'élevage de pieuvres, ce désastre qu'il faut empêcher

Les pieuvres sont des animaux sauvages très intelligents et naturellement solitaires, ils ne sont pas adaptés à la vie en captivité dans des élevages surpeuplés. Ce confinement peut entraîner un stress important, de l'agressivité et même du cannibalisme. De plus, cette pratique n'est pas durable car les pieuvres devraient être nourries de poissons sauvages capturés, ce qui contribuerait à la surpêche et à l'insécurité alimentaire de communautés déjà vulnérables dans le monde entier.

Depuis plusieurs années, CIWF réalise des campagnes de sensibilisation à la menace que représente l'élevage de pieuvres et avait publié en 2021 le rapport « Elevage industriel des pieuvres, désastre annoncé ». Ce rapport expliquait, preuves scientifiques à l’appui, pourquoi ces animaux sauvages, sensibles, intelligents et fragiles étaient totalement inadaptés à l'élevage et détaillait les impacts préjudiciables à l'environnement de ce projet.

Plus récemment, CIWF s'est associée à Eurogroup for Animals pour publier le rapport "Révélations sur les risques environnementaux de l'élevage de pieuvres" (rapport en anglais, résumé en français) qui souligne les fortes inquiétudes environnementales suscitées par le projet de ferme de Gran Canaria, où NP prévoit d'élever environ un million de pieuvres chaque année pour l'alimentation.

Le mois dernier, une centaine de scientifiques ont uni leurs voix pour demander aux législateurs américains de maintenir les pieuvres à l'état sauvage, en appelant le Congrès américain à adopter une interdiction de l'élevage de pieuvres à l'échelle des États-Unis. Des interdictions ont déjà été introduites dans les États de Washington et de Californie, et un projet de loi bipartisan a été présenté au Congrès américain, qui pourrait interdire l'élevage commercial de pieuvres dans l'ensemble du pays.