La loupe

Rapport sur l’abattage en France : et maintenant ?

News Section Icon Publié 20/09/2016

Le rapport remis ce jour par la Commission d’enquête parlementaire sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie, propose de nombreuses avancées dont CIWF se réjouit. Certains points méritent des précisions, et suscitent encore des questionnements. Et surtout, pour que ce rapport ne reste pas lettre morte, il faut désormais que les députés se saisissent du sujet et que les points importants de ce rapport soient transposés dans une proposition de loi. Celle déposée en juillet par les députés Geneviève Gaillard et Jacques Lamblin peut en être le vecteur, si elle est mise à l’ordre du jour avant le changement de mandature de février ! 


De belles avancées:

Le Rapport recommande de nombreuses propositions positives pour faire évoluer la protection des animaux en abattoirs. Des questionnements subsistent, sur les moyens alloués, tant humains que financiers et les méthodes :

La vidéosurveillance : une victoire significative, reste à définir le contrôle et la fréquence :

La proposition 62 recommande de « Rendre obligatoire l’installation de caméras dans toutes les zones des abattoirs dans lesquelles des animaux vivants sont manipulés ». L’instauration obligatoire de vidéosurveillance dans les abattoirs et notamment au poste d’abattage, sur les quais de déchargement et dans les zones de stabulation est une demande que CIWF porte depuis des années, en France comme à l’étranger. C’est donc une excellente nouvelle. Mais la vidéosurveillance seule ne suffit pas, elle n’est qu’un outil. Les questions principales demeurent à savoir : Qui va visionner ces vidéos et quand ? Les problèmes principaux tiennent avant tout des effectifs et des contrôles. Une vidéo-surveillance sans contrôle indépendant et sans personnel d’inspection pour visionner les bandes et les traiter ne sert à rien Il faut donner plus de moyens aux services vétérinaires afin que ce soient eux qui puissent effectuer ces visionnages à échéances fréquentes.
Voir le rapport de CIWF sur la nécessité de la vidéosurveillance.

De l’importance de créer des postes supplémentaires : 

La proposition 50 et 52, pour une augmentation des contrôles et la présence permanente d’agent aux postes d’étourdissement est également une mesure que nous soutenons fortement. L’augmentation des effectifs des services vétérinaires afin de renforcer les contrôles à tous les postes, notamment au poste d’abattage (et pas seulement sur les aspects sanitaires mais aussi sur le bien-être des animaux) est essentielle. Mais comment ces créations de postes seront-elles être financées et par qui ? Stéphane Le Foll affirmait il y a quelques mois que 500 postes supplémentaires de vétérinaires étaient nécessaires dans les abattoirs mais avouait en même temps qu’il n’y avait pas de budget pour cela.

Autre bémol : pourquoi limiter la présence d’un agent vétérinaire aux postes d’étourdissement et de mise à mort aux établissements de plus de 50 salariés quand on a vu ces derniers mois que les infractions et disfonctionnements étaient aussi souvent dans de petits abattoirs ?

Abattage rituel : des propositions en demi-teinte

Le rapport ne préconise pas la fin de la dérogation permettant l’abattage sans étourdissement pour des raisons rituelles, mais seulement « une modification du code rural […] afin de préciser que l’étourdissement réversible et l’étourdissement post-jugulation sont possibles en cas d’abattage rituel ». Il est utile de développer ces mesures de toute urgence et nous nous réjouissons qu’elles aient été proposées. Néanmoins, CIWF aurait souhaité que le Rapport a minima rendre l’étourdissement post jugulation obligatoire et exige l’adoption de modes opératoires spécifiques, avec la présence d’un vétérinaire permanente. En parallèle, CIWF demande toujours à la France de rendre obligatoire l’étourdissement préalable à la saignée en toutes circonstances.

L’abattage sans étourdissement est déjà interdit dans plusieurs pays : Suède, Danemark, Lettonie, Suisse, Liechtenstein, Islande et Norvège. CIWF déplore que la France n’ait pas eu le courage de prendre position clairement sur ce point.

Le sort des volailles : des propositions bien trop faibles alors que près de 90% des animaux abattus en France chaque année sont des volailles

L’étourdissement par électronarcose par bain d’eau des volailles, généralisé en France, est inefficace. En abattage rituel, les paramètres utilisés ne garantissent pas un étourdissement suffisant, et ne font qu’immobiliser ou paralyser les volailles « ne faisant qu’entrainer une douleur supplémentaires » (OAV)

Si CIWF accueille avec intérêt la proposition 13 du Rapport qui propose d’ « Étudier les enjeux financiers d’une généralisation de l’étourdissement par gaz pour les volailles et le recours au programme d’investissements d’avenir », CIWF estime cela insuffisant. Des études financières ont d’ores et déjà été faites au niveau européen, notamment par la Commission Européenne, et elles doivent maintenant être mises en place. CIWF demande le soutien de l’Etat au développement de l’étourdissement des volailles par méthode gazeuse. C’est aujourd’hui la seule qui permette de garantir le moins de souffrance des animaux. Elle est pratiquée dans la majorité des abattoirs au Royaume Uni, aux Pays-Bas, en Allemagne, et dans de nombreux autres états membres pour des raisons de bien-être animal.

Idem pour les cochons (proposition 14). CIWF demande le développement de méthodes alternatives non aversives. Le Règlement 1099/2009 souligne dans son préambule l’importance de poursuivre les discussions à propos de l’abandon progressif de l’usage du dioxyde de carbone, mais sept ans après son adoption, très peu a été fait pour trouver des solutions alternatives non aversives. 


Autres points en questionnements :

Il reste des doutes sur la protection du Responsable de protection animale (RPA), les cadences, les visites d’abattoirs par des ONG, le renforcement de la formation des salariés, les moyens mis à disposition de l’expérimentation de dispositifs d’abattage mobiles, l’étiquetage du mode d’abattage …

Ce rapport est très prometteur et CIWF s’en réjouit, mais il reste de nombreux points qui méritent d ‘être clarifiés et surtout, il faut désormais que ces propositions intègrent les textes de lois pour devenir effectives.
C’est pourquoi CIWF demande à ce que les députés intègrent ces points dans la proposition de loi d’ores et déjà prometteuse de Geneviève Gaillard et Jacques Lamblin, et surtout que celle-ci soit mise à l’ordre du jour des discussions à l’Assemblée nationale avant la fin de la mandature, en février !


Pour plus d’informations, CIWF a rédigé un rapport relatant les problèmes et les recommandations pour améliorer la filière des abattoirs en France.

Contact presse
Claire Hincelin – claire.hincelin@ciwf.fr - 01 79 97 70 53 - 06 26 07 55 43

CPAbattageremiserapport.pdf:

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