Environ 660 millions de dindes sont élevées chaque année pour leur viande, dont plus de 240 millions en Europe. La France est le quatrième producteur mondial, avec environ 44 millions de dinde abattues.
Un peu d'histoire
Les dindes que nous connaissons aujourd'hui descendent d'une variété sauvage, originaire du Nord des Etats-Unis. Elles ont été ramenées en Europe par les Espagnols qui ont découvert ces animaux de compagnie favoris des Aztèques.
Les dindes sont des oiseaux curieux de nature, capables de voler et de courir vite. A l'état sauvage, ces oiseaux vivent en groupe, expriment des comportements remarquables (comme la parade sexuelle ou encore le répertoire vocal particulièrement vaste) et le soir, chaque individu se perche au même endroit, sur sa branche favorite.
Avant la seconde guerre mondiale, la dinde était considérée comme un plat luxueux, mais les élevages intensifs en ont fait un plat de volaille populaire.
Les dindes commercialisées actuellement sont majoritairement des souches à larges poitrines, à croissances rapides. Elles sont élevées dans des hangars fermés contenant des milliers d'oiseaux. L'élevage intensif ne permet pas aux dindes d'avoir un accès à l'extérieur au cours de leur vie.
L'élevage intensif de dindes
Les systèmes intensifs empêchent les dindes d’exprimer la plupart de leurs comportements naturels, ce qui peut engendrer du stress et nuire à leur santé. Aucune réglementation, française ou européenne, n'encadre les conditions de vie des dindes en élevage. Les dindonneaux sont logés dans des hangars surpeuplés de plus de 10.000 oiseaux, artificiellement éclairés et ventilés, et dépourvus de matériaux pouvant leur permettre d'exprimer leurs comportements naturels.
Il n'existe pas de limitation de surface de l’élevage, et la densité de ces élevages est de 8 dindes par m2. L'unique aménagement de ces hangars sont les points de d'eau et de nourriture, avec de la litière sur le sol pour absorber les excréments. Cette extrême pauvreté du milieu entraîne des comportements anormaux, comme des picages, qui peuvent à leur tour provoquer des blessures voire la mort de l'animal. Pourtant, des études ont montré que des aménagements simples (comme des barrières pour structurer l'espace ou des supports de picage) diminuent les lésions dues à la sur-agressivité et la mortalité.
Les dindes femelles sont abattues à 91 jours et les mâles à 105 jours. Ces conditions d'élevage sont vécues par 97 % des dindes élevées en France. Leur chair est ensuite commercialisée sans étiquetage spécifique, ou avec la mention « certification de conformité (CCP) ».
Elevage intensif de dindes (remarquez la forte densité et les oiseaux avec le bec coupé)
Surpeuplement
Les dindes confinées dans des bâtiments surpeuplés ne peuvent pas se déplacer librement ni changer de place pour éviter la chaleur ou la saleté. Quand la litière devient humide, elle dégage de l'ammoniac provoquant des inflammations cutanées, des problèmes oculaires et respiratoires. Elle peut aussi causer de douloureuses plaies aux pattes. Ces lésions, observées dès les premières semaines de vie de l'animal, sont douloureuses (surtout pour les stades avancés) et peuvent conduire à des infections plus générales. La surpopulation et une mauvaise ventilation peuvent conduire à des températures élevées, ce qui provoque chez les oiseaux de l'inconfort et un stress thermique.
Pattes déformées
La croissance rapide des dindes provoque des déformations des pattes et des troubles locomoteurs, en particulier chez les mâles plus lourds. On observe alors une démarche anormale, induisant de la fatigue et des boiteries. Des graves ulcères aux pattes sont également plus fréquents chez les oiseaux mâles.
Reproduction naturelle impossible
A l'état sauvage, le dimorphisme sexuel (notamment la différence de poids et de taille entre le mâle et la femelle) des dindes est déjà très marqué. Les sélections génétiques actuelles ont accentué ce phénomène. Les mâles reproducteurs atteignent aujourd'hui des poids extrêmes et souffrent souvent de graves problèmes articulaires. Les dindons sont sont trop lourds pour s'accoupler naturellement et la fécondation se fait donc par insémination artificielle. Pour que les reproducteurs issus de souches à croissance rapide soient en bonne condition physique à l'âge de fertilité, leur nourriture est restreinte. Ces animaux souffrent de faim chronique.
Propagation des maladies
Bien que des vaccins existent pour de nombreuses infections, le surpeuplement ,source de stress, affaiblit le système immunitaire et augmente le risque de propagation des maladies infectieuses. L'épidémie de 2007 de la grippe aviaire en Europe a eu des effets dévastateurs sur l'industrie de l'élevage de la dinde.
Eclairage, agression et débecquage
Les hangars sont faiblement éclairés pour que les oiseaux soient moins actifs et ainsi réduire leur agressivité due aux mauvaises conditions d’élevage dans ces bâtiments sans enrichissement. Les agressions et le problème du cannibalisme sont souvent contrôlés en débecquant systématiquement les oiseaux - une opération réalisée sans anesthésie. Le bec est le principal « outil » de l'oiseau et est très innervé : le débecquage peut être très handicapant et, parfois même, peut provoquer des douleurs à chaque coup de bec.
Elevages plein air et biologique
Il existe des alternatives, qui offrent de bien meilleures conditions d 'élevage pour les dindes .
Elevage plein air, Label Rouge et AOP Dindes de Bresse
Les dindes commercialisées sous l'appellation Label Rouge ou AOP Dindes de Bresse sont issus de souches rustiques à croissance lente. Ils ont accès à un parcours herbeux en journée (6 m² minimum par dinde, 20 m² pour les dindes AOP), qui doit être largement couvert par la végétation (et arboré pour le Label Rouge). Dans le cas du Label Rouge élevé en liberté, le parcours est illimité.
L'air libre et la lumière du jour permettent aux oiseaux d'avoir de meilleures conditions respiratoires et évite des problèmes oculaires. A la nuit tombée, ils rentrent dans des bâtiments. La surface maximale de l’élevage est de 1600 m² avec un maximum de 2500 dindes par bâtiment,(1 500 pour l'AOP). Les densités sont limitées, selon les stades de vie de la dinde :
- maximum 10 dindes/m² jusqu’à 7 semaines (11 dindes/m² jusqu'à 10 semaines pour l'AOP),
- puis 6,25 dindes/m² (6 dindes/m² pour l'AOP).
Le débecquage et le dégriffage sont interdits.
Le système plein air utilisant des espèces à croissance plus lente, les dindes souffrent moins de problèmes de cœur et de boiteries, souvent causés par une croissance trop rapide.
Les dindes sont abattues à 140 jours minimum pour les dindes à rôtir, à 98 et 126 jours pour les dindes de découpe (respectivement pour les femelles et les mâles).
La distance entre l'élevage et l'abattoir doit être inférieure à 100 km et ne pas excéder 3 h de transport. Pour les dindes AOP, la densité dans les cages est limitée.
Elevage biologique
Les élevages Bio relèvent d´un cahier des charges proche de celui des dindes fermières Label Rouge. Les dindes ont également accès au plein air, ce qui leur permettent d'avoir une meilleure qualité de vie. Elles peuvent ainsi s'exercer, explorer et adopter un comportement naturel. Les dindes bio bénéficient aussi parfois d’un parc herbeux étendu. Là aussi, l'espace disponible par oiseau réduit le stress des oiseaux et les comportements agressifs, et il n’est pas nécessaire de leur couper l'extrémité du bec.
Les dindes disposent d'au moins 10m² d'espace extérieur chacune et la densité dans les bâtiments est limitée. La surface maximale de l’élevage est de 1600 m², avec 2500 dindes maximum par bâtiment. Souvent, des abris mobiles sont utilisées à l’intérieur des bâtiments et à l’extérieur, des arbres ou arbustes font office d’abris. Les aliments donnés aux dindes sont issus de l’agriculture biologique, dont 20% provenant de l’exploitation ou d'autres exploitations bio de la région.
L'âge d'abattage n'est pas limité, sauf si l'éleveur n'utilise pas de souches à croissance lente. Dans ce cas, les dindes doivent être abattues à 100 jours minimum.
Elevage plein air biologique de dindes (notez les becs non coupés).
Consommez responsable
Si vous achetez de la dinde, optez pour ces labels qui garantissent plus d’espace par animal et un accès au plein air :
- Biologique
- Label Rouge
- Plein air
- En liberté
- Fermier
Pour avoir la mention « fermier », une volaille doit être bio, Label Rouge ou AOC.