Publié 23/08/2021
La loi climat, échec « cuisant » de la France face aux enjeux climatiques
La loi Climat, définitivement adoptée le 20 juillet après les débats à l’Assemblée nationale et au Sénat, n’est pas du tout à la hauteur de l’enjeu. Son titre 5 « Se nourrir », notamment, est très maigre :
- Menus végétariens : la loi climat prévoit bien la pérennisation du menu végétarien hebdomadaire dans le scolaire et la mise en place en 2023 d'une option végétarienne obligatoire en cas de choix multiples dans les cantines relevant de l'État, et de façon facultative pour les cantines relevant des collectivités.
- Mais les produits issus de l’élevage intensif demeurent dans la part des produits dits « de qualité » dans les cantines ! Les députés comme les sénateurs ont refusé de corriger ce scandale. A compter de 2024, une part minimale de 60% de viandes devra répondre aux critères dis « durables » (et 100% pour les cantines relevant de l’Etat) et à compter de 2027 (au lieu de 2030), la certification environnementale de niveau 2 est exclue des produits dits « durables ».
De bien maigres « avancées » donc…
La loi Climat ne fixe aucun objectif de réduction globale de la consommation de produits issus de l’élevage, contrairement aux préconisations de la Convention Citoyenne pour le Climat.
Par ailleurs, elle ne donne aucun objectif d’alignement du Plan Stratégique National de la PAC avec la Stratégie Bien-être animal.
Le texte est en cours d’examen par le Conseil Constitutionnel avant son entrée en vigueur.
Ainsi, malgré l’urgence et les alertes scientifiques, malgré les fortes attentes des citoyens, malgré les préconisations précises de la Convention Citoyenne pour le Climat après un an de travaux, malgré la mobilisation des ONGet de leurs sympathisants, le parlement français a donc adopté une loi climat totalement vide, qui ne porte aucune mesure concernant l’élevage pourtant au cœur des enjeux climatiques. Il reste tout à faire pour initier l’indispensable transition agroécologique de nos systèmes d’élevage.
Pourtant les scientifiques du GIEC alertent une nouvelle fois !
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié le 9 août un nouveau rapport intitulé « Changements climatiques 2021 : les éléments scientifiques ». Ce rapport alerte, une nouvelle fois, sur l’ampleur et la rapidité des changements observés : c’est sans précédent, même les prévisions précédentes de ce même GIEC étaient en deçà.
Les impacts du changement climatique sur les humains, les animaux et la planète sont majeurs comme en témoignent les événements tragiques et meurtriers observés cet été dans différentes parties du globe (incendies dévastateurs, vagues de chaleur, inondations etc.). Il est urgent de limiter, au niveau mondial, nos émissions de gaz à effets de serre, de protéger et restaurer la nature.
Le réchauffement climatique s’accélère et notre système alimentaire est bien en cause.
En effet, le secteur agricole, et l’élevage intensif en particulier, est le deuxième émetteur de gaz à effet de serre. En plus d’être la plus grande cause de cruauté envers les animaux, il entraîne une expansion des terres agricoles dans les forêts et donc une perte massive de biodiversité ainsi qu’une libération dans l’atmosphère de quantités énormes de CO2. L'élevage intensif est également le champion des émissions de protoxyde d'azote et de méthane, il gaspille nos ressources en eau et en terres arables, pollue nos sols et nos océans. Il faut « désintensifier » l’élevage et diviser par 3 notre consommation de viande individuelle.
Approuvé par 195 Etats, ce rapport servira de base scientifique aux discussions de l’Assemblée Générale des Nations unies en septembre et aux négociations de la COP 26 en novembre.
Sommet des Nations Unies de septembre : le sujet des systèmes alimentaires est enfin sur la table !
Si en France, les dirigeants sont en réalité, manifestement, encore dans le déni, d’autres entendent les éléments scientifiques du GIEC, comme le secrétaire général des Nations unies, António Guterres : la transformation de notre système alimentaire est incontournable et il faut le reconnaître à l’échelle mondiale.
C’est précisément l’ambition du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires prévu en septembre, et CIWF a décidé d’y participer activement !
Ce sommet indique enfin qu’il y a urgence : sans cette transformation, les gouvernements du monde entier ne parviendront pas à atteindre leurs propres objectifs de développement durable (ODD).
L’élevage est bien au cœur du problème. Il est responsable de plus de gaz à effet de serre que les émissions directes de tous les avions, trains et voitures du monde réunis. Près de la moitié de la surface habitable de la planète est utilisée pour l'agriculture dont les quatre cinquièmes sont consacrés à l’élevage. Malgré l'étendue de ces terres, les produits de l'élevage ne fournissent que 37% des protéines à l'humanité et seulement un cinquième de ses calories. Absurde. Autres chiffres ahurissants : les humains et les animaux qu’ils élèvent pour se nourrir (80 milliards d’animaux terrestres par an) représentent 96 % de tous les mammifères de la planète. Tout le reste, des éléphants aux blaireaux en passant par les souris, ne représente que 4 %.
C’est pourquoi mettre fin à l'élevage intensif et à la dépendance excessive vis-à-vis des aliments d'origine animale est fondamental pour changer la donne.
Cela ne sera pas facile. Transformer les systèmes alimentaires nécessite de remettre en cause le statu quo et de savoir contrer les intérêts privés énormes de l’industrie de l’élevage. Mais CIWF compte bien peser de tout son poids et faire entendre ses arguments face aux lobbys industriels qui tenteront de minimiser les décisions.
Oui, le sujet de l’impact de notre alimentation s’invite enfin sur la scène politique mondiale. Il devra également être abordé en novembre lors des négociations climatiques COP26 à Glasgow !