Publié 20/07/2021
Dimanche, à la veille du conseil de l’UE « Agriculture et pêche » au cours duquel la Commission a communiqué aux ministres des informations sur l'initiative citoyenne européenne "End the Cage Age" ("Pour une nouvelle ère sans cage") qui s'est tenu hier, le ministre français de l’agriculture, Julien Denormandie, a fait deux annonces pour la France. Il s’agit de deux interdictions à partir du 1er janvier 2022 : l’interdiction d'éliminer les poussins mâles de un jour par broyage ou gazage et celle de la castration à vif des porcelets. Il n’a en revanche pas indiqué la position de la France quant aux cages, malgré la lettre commune de 13 ONG envoyée à ce sujet, la semaine précédente.
La fin de l'élimination des poussins mâles en France ?
Depuis des années, l’élimination des poussins mâles est vivement décriée par les citoyens et les associations de protection animale. Actuellement, 50 millions de poussins mâles sont broyés ou gazés chaque année en France. Ils ne produisent pas d’œufs et leur croissance est trop lente et trop faible pour être rentable pour un élevage de viande. Dans la filière canard gras, selon la même logique productiviste, 30 millions de canetons femelles sont éliminés chaque année.
En janvier 2020, le prédécesseur de Julien Denormandie, Didier Guillaume, s'était déjà engagé sur l'interdiction d'éliminer les poussins mâles avant la fin de 2021. Julien Denormandie semble enfin vouloir mettre en pratique cette interdiction : « Le Conseil d’Etat sera saisi à la fin de l’été d’un projet de décret, qui imposera qu’au 1er janvier 2022 tous les couvoirs de poules devront avoir installé ou avoir commandé des machines permettant de détecter le sexe des poussins en incubation dans l’œuf, avant éclosion. Le texte précisera également que ces appareils devront obligatoirement être installés et mis en service dans le courant de l’année. »
Des aides à l’investissement seront prévues pour accompagner les professionnels dans le cadre du plan France Relance.
CIWF se réjouit de cette annonce, il est plus que temps de mettre fin à la pratique d’élimination des poussins mâles, et attend de voir un cadre législatif ambitieux. Le "sexage in ovo" est une solution qui permet d’éviter cette pratique décriée mais… qui ne résout pas le problème de l’absence de valeurs des animaux mâles, ainsi que les enjeux de bien-être qui découlent de l’hyper spécialisation des races.
L’utilisation de souches duales qui peuvent produire œufs et viande de manière économiquement rentable, et l’élevage des « frères mâles » réalisé dans de bonnes conditions, sont aussi des pistes à explorer car elles offrent de meilleures alternatives à l’élimination des poussins mâles.
Par ailleurs, étant données les conclusions de travaux scientifiques réalisés sur la sensibilité embryonnaire, CIWF recommande une méthode de sexage le plus tôt possible, idéalement avant le 7ème jour (après incubation) pour l’encadrement législatif à long terme, et en tout cas avant le 14ème jour.
Interdiction de la castration "à vif" des porcelets
La castration des porcelets est mise en œuvre pour obtenir des porcs plus gras, tout en évitant l’odeur de verrat que peut dégager à la cuisson le gras d’un petit pourcentage de mâles "entiers" .
L’annonce du ministre n'est en réalité qu’un rappel d’une mesure déjà actée depuis février 2020 et qui entrera en vigueur en fin d’année. Elle rendrait obligatoire la prise en charge de la douleur lors de la castration.
Or, selon la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) et l'Association des Vétérinaires exerçant en Productions Organisées (AVPO), "aucune méthode de gestion de la douleur durant la chirurgie [castration] ne semble satisfaisante aujourd'hui, tant pour des raisons techniques, de stress ou de douleur pour l'animal, que de difficultés de mise en œuvre par les éleveurs" (20/03/2020).
La castration n’est pas indispensable. Là encore, des alternatives existent : la détection des carcasses odorantes sur la chaîne d'abattage et leur orientation dans un circuit de transformation sans cuisson (tel que le jambon ou le saucisson) ; ou encore l’ « immunocastration » qui bloque temporairement la puberté des porcs mâles et donc l'hormone à l'origine du risque d'odeur. L'élevage de mâles entiers (non-castrés) est également possible en ajustant leur alimentation pour diminuer la formation du principal composé odorant lors de la digestion, tout en veillant à la propreté du lieu ou encore à la luminosité.
En revanche, pas un mot sur les cages
Bien sûr, CIWF salue la confirmation de l’engagement sur la fin de l’élimination des poussins mâles, promise depuis deux ans. Le ministre l'a effectivement acté, hier, lors du conseil des ministres de l’agriculture européens, emboitant ainsi le pas de l'Allemagne. Il ne s'est hélas pas prononcé, à l’issue de la communication de la Commission européenne au sujet de l’initiative citoyenne européenne pour la fin de l’élevage en cage…