Publié 29/03/2021
Encore de nouveaux scandales liés au commerce des exportations de bétail vivant, des milliers de bovins ont été euthanasiés, après avoir enduré des conditions infernales sur deux navires, errant en Méditerranée pendant près de 3 mois, de mi-décembre à mi-mars ou encore cette semaine, seize navires bloqués en mer dans le canal de Suez...
Des milliers de bovins piégés durant trois mois en Méditerranée, finalement euthanasiés
Deux navires, le Karim Allah et l'Elbeik, ont quitté l'Espagne en décembre avec à leur bord plus de 2 600 bovins à destination de la Libye et de la Turquie. Toutefois, en raison des inquiétudes liées à une suspicion de fièvre catarrhale, ils se sont vus refuser l'entrée dans tous les ports qu'ils ont atteints.
Après plus d’un mois de navigation et plusieurs refus des ports tunisiens, le Karim Allah est parvenu à rejoindre l’Italie, où les bovins ont été partiellement déchargés. Après un examen vétérinaire, le cargo a fini par retourner en Espagne où les animaux ont finalement été euthanasiés.
Le Elbeik, lui, continuera sa traversée en Méditerranée à la recherche d’un port d’accueil. Le cargo a rejoint le port de Péloponnèse en Grèce. Les animaux ont pu y être ravitaillés en nourriture et boisson, cependant aucun examen médical n’a été pratiqué sur les bovins. Le Elbeik repartira en mer pour finalement retourner en Espagne où les bovins connaîtront le même destin que celui du Karim Allah.
Compassion in World Farming (CIWF) a alors contacté les ministères espagnol, italien et chypriote, ainsi que la Commission européenne, afin de trouver une solution, mais les deux navires ont reçu l'ordre de rentrer en Espagne.
Près de 200 000 animaux bloqués pendant une semaine dans le canal de Suez
Seize navires transportant des animaux vivants en provenance de l'Union européenne ont été bloqués du 23 au 29 mars derrière le cargo Ever Given, en panne. Même si l'Ever Given reprend lentement sa route, les 200 000 animaux vivants qui se trouvent dans les conteneurs de fret sont en souffrance parce qu'il y a un retard à combler et qu'ils manquent de nourriture et d'eau.
Les exportations d'animaux vivants, un problème de fond
Chaque année, l'UE exporte 3 à 4 millions de bovins et d'ovins vivants vers le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord, la Russie et les pays de l'ancienne Union soviétique. Ce sont de longs et terribles trajets, bien souvent dans des conditions insalubres, tellement à l'étroit qu'il en arrivent à se piétiner. En été, ils sont transportés dans des conditions de température extrêmement élevées, déshydratés et épuisés. Certains d'entre eux périssent.
« La Commission européenne s'apprête à réviser très prochainement les règles relatives au transport des animaux. Pour éviter de tels scandales et mettre fin une fois pour toutes à des souffrances inutiles, l'UE doit interdire les exportations d'animaux en dehors de ses frontières », a commenté Olga Kikou, chef de l'unité "Compassion dans l'agriculture mondiale" de l'UE.
La stratégie "de la ferme à la table" de la Commission européenne indique clairement que la Commission européenne a l'intention de revoir la législation sur le transport des animaux. En décembre 2019, le Conseil de l'UE a souligné dans ses conclusions sur le bien-être des animaux que "des lacunes et des incohérences évidentes subsistent" concernant les défis du transport longue distance.
Selon les rapports d'audit de la Commission européenne sur le transport des animaux par terre et par mer, les autorités des États membres ne respectent pas le règlement de l'UE sur le transport et ne le font pas appliquer régulièrement.
La quasi-totalité des voyages vers le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord sont effectués illégalement, car ils ne tiennent pas compte de l'arrêt de la Cour de justice de l'UE dans l'affaire Zuchtvieh, selon lequel la législation européenne sur le bien-être pendant le transport s'applique jusqu'à la destination dans le pays tiers.
Au-delà de ce problème de non-respect de la réglementation, un autre problème observé dans le transport maritime concerne "la qualité de construction, de conception et d'entretien des navires", indique Agathe Gignoux, responsable du plaidoyer pour CIWF France : "des inclinaisons de rampes très pentues, des hauteurs de pont très basses, des hauteurs de stalles trop basses", qui compliquent l'apport de nourriture, d'eau, et plus généralement, des navires vétustes, qui ont été réaménagés, "mais n'ont pas été construits pour le transport d'animaux".